Avoir 20 ans à Dachau

418amf0gp1l-_sx326_bo1204203200_Résumé : C’est un récit poignant, « sur la captivité de mon père » écrit Joëlle Delpech-Boursier sur André Delpech, qu’elle nous livre à travers ces pages. Durant plusieurs années, elle écoute, recueille patiemment ses mots, sa blessure, son témoignage distillé par bribes par ce jeune résistant, mais ô combien essentiel pour saisir et vivre notre aujourd’hui en liberté. André Delpech est quercinois, arrêté par la Gestapo à Cahors le 17 mai 1944, puis déporté au camp de la mort lente de Dachau, dans un des Kommando les plus durs de la vallée du Neckar en Allemagne, après avoir survécu au fameux train de la mort. Le récit évoque avec force détails l’enfer que ce jeune résistant a vécu dans sa déportation aux côtés de ses compagnons d’infortune dans ce camp de concentration, les Stücks qu’ils étaient devenus devant disparaître sans laisser aucune trace.Après la guerre, André Delpech fit une brillante carrière militaire avec le grade de général de corps d’armée. Son nom restera toujours attaché à Dachau dont il a présidé le Comité International pendant quatorze ans. La chancelière allemande Angela Merkel a accepté en 2013 de recevoir le prix de ce comité portant le nom du général André Delpech.Ce témoignage ainsi recueilli se veut avant tout un travail, un devoir de mémoire œuvre portée par une enfant d’un déporté résistant, elle qui n’a pas connu la guerre mais qui hérite d’une histoire et de certaines valeurs à transmettre pour aider à faire de nos enfants des citoyens. En particulier celles que son père a défendu toute sa vie, la liberté et le respect de la dignité humaine. « La liberté qui paraît évidente à ceux qui l’ont toujours connue, exige pour être conservée et vécue une vigilance constante des hommes et des femmes de tous les continents du globe » avait-il dit lors d’un discours prononcé sur la place d’appel de Dachau devant une assemblée internationale.

Joëlle Delpech-Boursier vient de publier, aux éditions Tirésias un émouvant et très beau livre sur la déportation de son père à Dachau. : «Avoir 20 ans à Dachau ». Celui qui devint le général Delpech, Général de corps d’armée, Inspecteur général des armées, jeune résistant de 20 ans, déporté à Dachau, ne parla guère de sa déportation car il disait : «on n’a pas à se glorifier d’avoir été un esclave. Quand on a vu la nature humaine dans toute son horreur on ne peut pas être fier, à ce moment-là, d’être un homme, un être humain ». Sa fille, Joëlle, a donc décidé de rassembler le maximum d’informations sur cette période de la vie de son père car,«il faut quand même que l’expérience puisse servir aux générations futures. C’est un devoir de mémoire! Si je suis là aujourd’hui, c’est pour que ces générations futures puissent, peut-être, réfléchir à ce qui s’est fait ici, dans ce camp derrière moi, et que cela ne recommence pas» , disait-il lors d’un discours prononcé dans le camp alors qu’il était président du Comité international de Dachau. En publiant ce livre, Joëlle Delpech-Boursier continue l’œuvre de son père qui fut pendant de nombreuses années président du Comité international de Dachau,
Plus de 200 000 personnes furent internées dans ce camp de1933 à 1945, dont 15 000 Français . La déportation d’André Delpech depuis le camp de Compiègne, entre le 2 et le 5 juillet 1940 se fit dans des conditions épouvantables puisque sur les 2521 prisonniers entassés dans le train à destination de Dachau plus de 900 étaient morts à l’arrivée au camp.
Dans ce livre, Joëlle Delpech-Boursier raconte avec minutie la vie en déportation de son père, mais aussi celle de ses camarades . Elle raconte comment son père a été sauvé grâce à l’action des médecins français du camp qui ont fait preuve d’un courage et d’un héroïsme peu communs, action qui est souvent méconnue. C’est sans doute inconsciemment l’ image de ces médecins qui explique que Joëlle soit devenue elle-même médecin… mais pas un médecin ordinaire, un médecin du travail.
Avec une grande minutie, l’auteure décrit la vie au camp dans un style très dépouillé. Mais, le médecin qu’elle est n’oublie pas d’évoquer également le traumatisme post-déportation des victimes de la barbarie, les milliers de décès survenus après la libération du camp, la difficile réinsertion des déportés, la douleur qui accompagna les déportés tout au long de leur existence.
Alors que les derniers déportés disparaissent il est important que leurs enfants reprennent le flambeau du témoignage. C’est ce que fait Joëlle Delpech-Boursier.
C’est un beau livre, à lire absolument; et qui vient d’être distingué par une mention du jury du Prix littéraire de la Résistance.